Manager une période de collaboration difficile
Doute du manager : manager une période difficile
Une collaboration, c’est fait de hauts et de bas. Il y'a des moments agréables quand on voit « grandir » un collaborateur. Et des moments plus durs : recadrage, sanctions disciplinaires, licenciements… Ces moments difficiles s’accompagnent d’une forte charge émotionnelle : très souvent nous ressentons de la colère, du dépit ou de la tristesse. On peut alors être tenté de sur-réagir, de répondre avec excès : envie de régler ses comptes, d’être cassant… ou alors, à l’opposé, de fuir et d’éviter le conflit !
Cet article, c’est l’occasion de faire un zoom sur les sanctions disciplinaires avec un double objectif :
👉Techniquement, comment ça marche les sanctions disciplinaires ?
👉Comment manager au mieux ces situations sensibles ?
Car, je suis persuadé que même dans ces situations difficiles, on peut aller chercher du positif et essayer d’en « sortir par le haut ».
Procédure et sanction disciplinaires : de quoi parle-t-on ?
Le pouvoir disciplinaire : c'est quoi?
Dans la relation de travail, le collaborateur doit produire une tâche, un bien, une prestation, dans la qualité et la quantité attendue, selon les consignes données, en interagissant de manière plus ou moins forte et élargie avec un collectif de travail, un client, un fournisseur et son employeur. Il s’agit du CADRE DE TRAVAIL. Pour que la collaboration fonctionne dans ce cadre, l’employeur dispose d’un pouvoir hiérarchique envers son subordonné et notamment en cas d’écart, d’un pouvoir disciplinaire.
Poser un cadre, recadrage, management
Détenir un pouvoir disciplinaire ne signifie pas pour autant que l’employeur a « tout pouvoir » pour sanctionner son collaborateur. Que ce soit par rapport aux faits et manquements qu’il souhaite sanctionner, sur la procédure à adopter ou sur la sanction donnée, il doit respecter la réglementation légale c’est à dire le code du travail, les éventuelles dispositions de la convention collective (hé oui elle peut intervenir ici 😉) et, s’il existe, les dispositions du règlement intérieur.
Le règlement intérieur est obligatoire dans les entreprises de plus de 50 salariés. En matière d’obligations de seuil, les entreprises devancent rarement l’appel. Pourtant l’instauration d’un règlement intérieur dans les entreprises de moins de 50 salariés peut s’avérer utile pour poser le cadre de fonctionnement et de discipline au sein de l’entreprise et déterminer son échelle de sanction. Via le règlement intérieur se joue aussi la posture managériale de l’entreprise : outil préventif d’animation et de régulation, il peut ainsi marquer l’objectif de lisibilité et de partage du cadre de fonctionnement de l’entreprise.
Procédure et sanction disciplinaires : des points de repère importants
Quel délai de réaction pour les sanctions?
Vous avez 2 mois après la connaissance d’un fait fautif pour le sanctionner. Au-delà ce fait ne pourra pas être l’objet de la procédure …. Mais pourra être évoqué pour démontrer la récurrence du comportement.
Des étapes à respecter pour les sanctions?
Sauf disposition contraire de la convention collective ou du règlement intérieur, seules les sanctions ayant une incidence directe sur le contrat de travail (mise à pied, rétrogradation, … ) doivent respecter toutes les étapes de la procédure : convocation, audition, notification.
Les mises en gardes, avertissements peuvent être notifiés sans que l’intégralité de la procédure soit suivie … MAIS … dans certains cas (nature du manquement, climat social, respect du contradictoire) cela reste préférable et surtout cela participe au message disciplinaire et managérial.
Quel délai de notification pour les sanctions?
Une procédure disciplinaire ouverte doit être refermée…. La notification de sanction intervient au plus tôt 2 jours après l’entretien (la sanction ne doit pas être donnée en entretien !) et au plus tard 1 mois après. Sur les plans RH et managérial, laisser passer le délai sans rien formaliser est incorrect.
Pondérer et proportionner une sanction disciplinaire
Il s’agit de respecter le salarié qui a subi une procédure disciplinaire jamais agréable et qui mérite un retour.
Et si finalement vous avez décidé de ne pas sanctionner ? Le retour s’impose encore plus j’ai envie de dire ! Vous devez d’une part expliquer et valoriser les raisons qui ont fait que vous ne sanctionnez pas et, d’autre part, rappeler en quoi l’ouverture d’une procédure disciplinaire était néanmoins nécessaire.
Échelle de sanction : quel est le bon usage?
Lorsque vous disposez d’une « échelle de sanction » (via la convention collective ou votre règlement intérieur), utilisez-la à bon escient !
L’échelle de sanction vous permet de graduer les niveaux de sanction en fonction de la gravité du manquement lui-même et en fonction de la répétitivité du comportement fautif.
Elle peut aller de la mise en garde à la mise à pied disciplinaire, voire jusqu’au licenciement. Selon le pallier de sanction choisi, c’est aussi le tempo disciplinaire et le droit à l’erreur que vous définissez.
Faute, erreur et management : adapter sa réponse managériale
Un exemple concret de sanction disciplinaire
Un exemple concret : dans une entreprise de transport, il est décidé que tout sinistre responsable occasionnant plus de 5 000€ de réparation doit être sanctionné. Un conducteur est convoqué deux fois en trois mois pour des accrochages responsables.
Pondérer et proportionner une sanction disciplinaire
Spontanément, la Direction demande à sanctionner le collaborateur plus fortement la 2ième fois du fait de la récidive. Le manager me dit ne pas être à l’aise sur cette sanction. On creuse ce ressenti et finalement il exprime son désarroi à sanctionner un bon conducteur. En effet, ce conducteur qui sait manœuvrer dans des conditions difficiles est positionné sur une tournée accidentogène.
Nous décidons de fait de rester sur une sanction de premier niveau, actant le sinistre mais sans progressivité.
Un niveau de sanction qui n’évolue pas sur un manquement récurrent l’affaiblit. A l’inverse, un niveau de sanction qui se positionne dès le 1er manquement sur un haut palier de l’échelle de sanction (mise à pied par exemple) contraint tout manquement ultérieur.
Ainsi, la procédure et la sanction doivent être :
Toute formalisation d’une situation de manquement professionnel avec rappel du comportement attendu peut être qualifiée de sanction disciplinaire. 2 exemples :
Dans ces 2 cas, il a été jugé que ces éléments étaient constitutifs d’une sanction disciplinaire. Dans ce cadre, le manquement reproché ne peut en tant que tel et à lui seul être un fait réutilisé dans une procédure disciplinaire plus formelle. La nuance peut être difficile à saisir et cette jurisprudence constitue selon moi autant un risque qu’une opportunité.